Le Géracfas > Production Geracfas > Méthodologie de projet en IFAS : de l’enseignement à l’évaluation
Retour

Méthodologie de projet en IFAS : de l’enseignement à l’évaluation

Introduction :

Dans le cadre des enseignements du cursus de formation des aides-soignants, il semble essentiel d’introduire la notion de méthodologie de projet. Cet enseignement implique la mise en œuvre de projets-action.

En effet, la méthodologie en mode projet a l’avantage d’être transférable dans le milieu professionnel (projet de vie, projet personnalisé, démarche de soins). Elle est donc essentielle aux compétences métier.

Pourquoi mettre en valeur l’apprentissage par projet dans le cursus de formation des aides-soignants ?

C’est une méthode active qui consiste à apprendre par l’action, pratique assez courante dans l’enseignement professionnel car elle améliore la motivation des élèves et donne du sens aux enseignements.

Philippe Perrenoud[1] parle d’une entreprise collective gérée par un groupe classe qui s’oriente vers une production concrète à travers un ensemble de tâches favorisant les apprentissages.

La pédagogie par projet permet également un investissement et une responsabilisation de chacun ainsi qu’un travail en équipe. Elle donne la possibilité de souder le groupe.

Le mode projet tend à susciter la recherche de solutions[2] et c’est bien là l’intérêt pour amener le futur professionnel à réfléchir sur l’action. Il s’agit donc d’une méthode réflexive.

Enseigner la méthodologie du projet pour impliquer les apprenants dans un projet-action

Pour le formateur en IFAS, il ne s’agira pas seulement d’enseigner mais d’être le référent, l’accompagnateur dans la mise en œuvre de projets pour illustrer et faire vivre ses enseignements. En ce sens, il organise les apprentissages, aide à régler les problèmes de fonctionnement du groupe et assure l’aboutissement du projet et sa présentation. Le formateur doit respecter le cadre institutionnel et celui de la formation ; ainsi, le projet doit s’inscrire dans les attendus du référentiel de formation.

La pédagogie par projet impose des aspects concrets : il s’agit, en petit groupe, de réaliser des projets au plus proche de la réalité du monde professionnel.

Un des aspects importants est la gestion du temps. Le projet s’inscrit dans un calendrier plus ou moins contraint. Car le déroulé peut-être réinterrogé à chaque étape du projet. Cependant, une date butoir

(présentation) doit être, forcément, respectée. La gestion du temps occupe donc une importance majeure. C’est pourquoi, le formateur en charge du projet veillera à une planification et une structuration du projet en amont pour coordonner au mieux les actions.

Ainsi, il doit préparer ses séances pédagogiques chronologiquement de la façon suivante :

En amont, il présente la méthodologie et les règles de fonctionnement. Puis, il accompagne les apprenants dans les 4 temps du projet qui suivent :

  • L’analyse du besoin : quel est la nature de ce projet ? à quelles attentes répond-il ? ...Objectifs
  • L’organisation, la constitution du groupe de travail et la planification : identifier les acteurs (élèves AS mais aussi éventuellement des personnes extérieures), se répartir les rôles au sein du groupe, s’accorder sur le déroulé…
  • La réalisation et la présentation : mise en œuvre du projet (actions) puis présentation de celui-ci (phase finale).
  • L’évaluation : rétroaction, analyse : étape importante car c’est ce moment qui permet la réflexivité, le retour d’expérience et, le cas échéant, le repérage de dysfonctionnements, essentiels si ce projet est amené à être reconduit.

L’analyse permet de vérifier les attendus évoqués mais aussi les avantages de la mise en œuvre du projet dans le cursus.

Quels projets peuvent être proposés à une promotion d’apprenants aides-soignants ? Ce sont sans doute les projets d’animation et d’éducation à la santé qui sont les mieux adaptés car ils ont un lien avec les exigences du référentiel, d’une part, et les grandes orientations nationales et régionales concernant la santé [1], d’autre part.

Retour d’expérience

L’équipe pédagogique va se saisir de l’évaluation du projet pour mesurer l’acquisition de connaissances par l’expérience.

L’intérêt de cette méthodologie est la mobilisation des compétences transversales telles que la communication, le travail en équipe et le « rendre compte » car elles font partie intégrante de la substance même du projet. De surcroît, ce dernier nécessite souvent l’utilisation des outils numériques qui parfait l’habileté de communication. Les formateurs observent que l’apprenant, bien que travaillant en groupe, va développer une autonomie et un sens des responsabilités car il s’engage dans un dispositif pour arriver à un résultat final dans lequel il est impliqué.

Le développement de compétences et de l’autonomie n’est pas facile à évaluer dans immédiateté du projet.

Ce dernier n’est pas « un long fleuve tranquille » pour le formateur qui, bien qu’il mesure son intérêt, connaît aussi ses écueils, difficultés et limites. Parmi celles-ci, nous pouvons noter l’aspect chronophage du projet et un investissement important. Le formateur doit pouvoir accepter l’imprévu et potentiellement l’échec.

Conclusion

L’enseignement en mode projet est une des stratégies pédagogiques qui semble parfaitement adaptée aux formations professionnelles. Outre le fait de mobiliser les apprenants dans des actions concrètes, c’est aussi un biais pour mobiliser leur attention. En effet, en IFAS, nous sommes tenus à réaliser des enseignements de 35h par semaine. Quand ceux-ci sont essentiellement magistraux ou théoriques, les apprenants se dispersent et deviennent indisciplinés, obérant par ce fait l’acquisition des savoirs. Le mode projet peut devenir un des outils pour diversifier nos enseignements, les rendre plus concrets et davantage ancrés dans la réalité professionnelle.




Verbatim de 2 formateurs

Témoignage 1

Bernadette Wirtzler, cadre de santé formateur

Au cours de l’année dernière, nous avons eu la chance de vivre une expérience originale avec un groupe de 15 apprenants aides-soignants au travers d’un projet d’animation.

En effet, nous avons saisi l’opportunité de rejoindre un projet initié par deux structures partenaires, une MAS et une Scène Nationale de Danse. Il s’agissait de la création par un chorégraphe d’un spectacle de danse dont les acteurs étaient des personnes en situation de handicap, résidents de la MAS. Les élèves aides-soignantes participaient au spectacle avec les résidents.

L’objectif, initialement visé par ce projet, était la notion d’inclusion des personnes vulnérables dans notre société et, dans le cas présent, plus particulièrement, la sphère de la culture.

Cette démarche pédagogique était inscrite dans une logique permettant d’aborder des éléments du référentiel de formation (Modules 3 et 5).

Outre l’atteinte de l’objectif fixé, en tant que formateurs, nous avons pu observer et identifier des bénéfices non perçus au départ comme la richesse d’une expérimentation, la possibilité d’une posture réflexive (se recentrer sur soi pour s’ouvrir à l’autre) mais aussi une prise de conscience de l’importance du corps et de l’intime. Des liens ont été faits par les apprenants entre le corps « soigné » et le corps « animé » par la danse. 

 

Témoignage 2

Manuelle Perrin, infirmière formatrice,

« Dans le cadre d’un partenariat avec l’Office d’hygiène sociale de Lorraine[1], un groupe de 7 apprenants a mené un projet d’éducation à la santé dans un EHPAD » auprès de 14 résidents.

Ce projet consistait à participer à la prévention des chutes des personnes âgées et proposait 3 ateliers se déclinant ainsi : l’identification des facteurs de risques de chutes et leurs mesures de prévention par un jeu de plateau, le maintien des capacités fonctionnelles par un parcours de motricité et l’enseignement d’une technique pour se relever après une chute.

L’objectif terminal était de réduire les risques de chutes en favorisant l’autonomie et de créer un lien intergénérationnel. L’acquisition de compétences en communication (module 5) et en ergonomie (module 4), l’identification du rôle de l’aide-soignant dans la prévention des chutes (module 3) représentaient les objectifs en lien avec le référentiel de la formation.

A chaque étape du projet, nous avons pu observer que les apprenants ont développé leur posture professionnelle et leur capacité à travailler en équipe. Nous pouvons également remarquer que ce mode d’enseignement permet aux apprenants de faire preuve d’idées innovantes pour réinvestir des connaissances et des compétences acquises lors de stages ou d’expériences professionnelles précédentes. Lors de la mise en œuvre du projet, nous avons souligné la capacité des apprenants à s’adapter à des difficultés de communication avec les résidents, nécessitant de reformuler ou encore d’apporter des modifications aux activités prévues. D’une manière générale, la méthodologie de projet bénéficie aux apprenants dans le sens où elle permet de transposer les compétences acquises au cours de leur vie professionnelle future.



Michèle Marchi
Directrice de l’IFAS et l’IFAP EN Pont St Vincent et Metz

Secrétaire de l’association GERACFAS

ifas@ac-nancy-metz.fr 




[1] Philippe Perrenoud, « Apprendre à l’école à travers des projets : pourquoi ? Comment ? » Université de Genève, 2002

[2] Louise Lafortune est professeure titulaire en sciences de l’éducation à l’université du Québec à Trois-Rivières. Elle est auteure d’articles et livres portant sur : affectivité et métacognition, pensée et pratique réflexives, accompagnement socioconstructiviste d’un changement, travail en équipe de collègues, jugement professionnel, leadership et écritures réflexives et professionnelle)

[3] Solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/dossier_sns_2017_vdef.pdf

https://www.grand-est.ars.sante.fr/projet-regional-de-sante-grand-est-2018-2028-2eme-generation

Objectif N°3 du PRS, Axe 1 de la stratégie nationale de santé

Nous écrire
Les champs indiqués par un astérisque (*) sont obligatoires
Vous voulez devenir aide-soignant(e)